Tribune Senlis Ensemble : #367 Mars / Avril / Mai 2024

A Senlis, dix ans d’une friche urbaine sans aucun emploi public : bilan zéro pointé à Ordener

A Noyon, le quartier militaire Berniquet, acheté pour l’euro symbolique en juillet 2011 par la communauté de communes accueille désormais le campus économique Inovia avec 40 entreprises dans une dizaine de bâtiments rénovés, un internat de la réussite avec 150 élèves, une école de formation aux métiers du numérique depuis 2016 et une pépinière éco-industrielle. A Brive, la caserne Brune, achetée aussi à l’euro symbolique, a été transformée en lieu de vie mixte puisqu’elle accueille maintenant le CCAS. Le centre municipal d’arts plastiques, le conservatoire, un centre de congrès et de concerts, une centaine de logements dont 30% sociaux et 2 500 m² de commerces de proximité en rez-de-chaussée, un hôtel de 80 chambres et un campus des métiers de la santé. D’autres villes moyennes ont racheté d’anciens quartiers militaires, il y a dix ans, pour un euro symbolique et en ont créé des quartiers mixtes de service public, de formation, de commerces et de logements. Et à Senlis ?

La mairie a commencé par acheter le quartier Ordener à un prix astronomique : 1 365 000 € pour les 12 hectares de l’ancien quartier du 41ème régiment des transmissions. Le projet phare de Mme Loiseleur depuis 2011 était le Centre Européen de Biomimétisme qui devait grouper un pôle de formation, des laboratoires et 350 emplois de chercheurs. Et puis, de fil en aiguille, si le biomimétisme a décollé en tant que concept partout dans le monde, la ville de Senlis s’est faite blouse de toute l’innovation qu’elle avait pu lancer. le CEEBIOS est devenue une entreprise de droit privé à laquelle la ville a même cédé la marque et le site Internet. Le salon BiomimExpo qui a largement été subventionné par la ville, les premières années, puisque lancé à Senlis avec les moyens mis à disposition par la mairie de Senlis vit désormais sa vie ailleurs pour le grand bénéfice du prestataire dont les fonds publics.

Au final, comme attesté par la chambre régionale des comptes lors de son rapport édifiant : pas de chercheurs biomimétiques à Senlis et aucun démonstrateur. Aucun emploi biomimétique local et une entreprise au conseil d’administration de laquelle Mme Loiseleur continue de siéger sans que le conseil municipal ne soit jamais informé des résultats annuels de l’entreprise. ” Ah, mais si vous ne posez pas de questions sur le CEEBIOS !” va-t’on nous rétorquer, alors qu’on nous reproche déjà au dernier conseil municipal d’en poser trop, des questions. Donc, le quartier Ordener n’est pas devenu la Mecque du biomimétisme, mais il a accueilli la manufacture de Senlis : une entreprise de maroquinerie haut de gamme, sous-traitant pour une marque française de luxe, qui emploie d’après madame la maire, 300 personnes sur le site. La ville et la communauté de communes ont d’ailleurs aménagé pour plus d’un million d’euros HT un parking utilisé par les employés du site. Nous lisons dans les journaux que cette entreprise s’agrandit en 2024 à Margny-les-Compiègne, une ville directement reliée par le train à Paris et aux autres villes de l’Oise. Est-ce que ce développement permettra de conserver l’emploi à Senlis ? Personne n’a évoqué ce point. Et si Senlis se faisait encore blouser ?

Et la vingtaine de bâtiments sur le site ? La communauté de communes a rénové les bâtiments 1 et 6 qu’elle loue à une poignée d’entreprises. Le manège n’est plus chauffé l’hiver. Clésence, l’ADHOJ et la SA HLM de l’Oise ont développé 129 appartements, 65 places de foyer jeunes travailleurs et 18 logements à destination des jeunes actifs et étudiants. Le reste des bâtiments est à l’abandon. La mairie annonce bien le nouveau conservatoire pour un budget de 5,1 millions HT de travaux (7 millions TTC avec les honoraires divers et aléas) à la place de l’ancien mess des officiers avant la fin de ce mandat. Elle n’a pourtant jamais fait sortir de terre aucun bâtiment de cette envergure … Mais il n’y aura ni nouveaux locaux pour la police municipale, ni aucun autre service public. Le site n’est même pas piéton. Qui sait si le transformateur à pyralène a été dépollué ? Heureusement, les bénévoles de l’association du Tiers Lieu animent des fresques du climat, des répar’café et des ateliers de cuisine solidaire. Cela fait de l’animation de qualité bienvenue sur le site et surtout, qui ne coûte pas un sou à la mairie ! Ah, si seulement toutes les associations senlisiennes pouvaient bénéficier d’un local bien chauffé et aussi bien situé …